Alors que l’actualité nous abreuve de glyphosate, néonicotinoïdes, édition de gènes, etc. Christian Huyghe, Directeur scientifique Agriculture INRA, chef de projet AKER, prend du recul dans une intervention intitulée « La perception du progrès technique par la société » dans le cadre du 76ème Congrès de l’IIRB (International Institute of Sugar Beet Research).
Citant le philosophe Etienne Klein, Christian Huyghe constate que le progrès a perdu son P majuscule, et qu’il est communément remplacé par le terme innovation. À travers le siècle des lumières (Condorcet), la théorie de l’évolution (Darwin), l’innovation au cœur du progrès économique (Schumpeter), etc. il montre que le progrès, l’innovation, la science ont perdu de leur superbe.
Le fossé ne cesse de se creuser aujourd’hui. Témoins, les controverses entre les scientifiques et les ONG, les critiques sur l’indépendance des chercheurs, l’émergence du « populisme scientifique » et le rôle incontournable des réseaux sociaux dans ce processus.
![]() |
Christian Huyghe considère que la question du sens et des valeurs est essentielle et qu’il faut prendre en compte globalement les quatre facettes de la performance - économique, productive, sociale, environnementale - si l’on veut réconcilier le progrès et la société.
Car la science a, selon lui, 3 attributs qui constituent les bases de l’expertise : l’équilibre des savoirs (l’autorité), la véracité de l’analyse (la légitimité) et la transmission du bien commun (la responsabilité).
Alors, il met en exergue des options pour l’avenir : construire un futur désirable, et donc durable ; accorder un rôle clé à la formation, partant du constat que les populations urbaines s’éloignent de plus en plus de l’Agriculture ; pratiquer le co-design (la co-construction) au sein des territoires, d’où les expériences de living-labs, pour passer de la conception à l’appropriation de l’innovation.
Ce débat n’est pas nouveau, mais il est exacerbé. On se rend compte qu’il est difficile d’aller a posteriori contre l’opinion, et tout aussi difficile d’anticiper les évolutions pour tenter de les intégrer dans le discours ambiant.