Le programme AKER correspond à un changement de paradigme dans le domaine de la recherche et de la sélection betteravière, sous-tendu par deux affirmations : AKER fait de la prédiction ; AKER gère la variabilité.
AKER ne fait plus de la sélection a posteriori, mais a priori. Dans le déroulement du programme, le génotypage passe avant le phénotypage. Auparavant, on évaluait les plantes au champ et on s’aidait ensuite de la génétique ; à présent, on commence par utiliser la génétique, et on évalue ses résultats a posteriori. Ce qui conduit à faire de la prédiction en travaillant sur des modèles. D’où l’importance de la bio-informatique, discipline incontournable du programme AKER.
AKER gère la variabilité en allant rechercher la diversité à travers les 10 000 ressources génétiques disponibles, pour aboutir au choix des 15 plantes de référence représentatives de cette diversité. On estime pouvoir récupérer ainsi 50 % de la variabilité, ce qui reviendrait à doubler la capacité à faire du progrès génétique. La démarche consiste à rechercher, incorporer, organiser, valoriser la variabilité, à faire en sorte qu’elle soit toujours disponible pour réagir et faire face à de nouvelles contraintes.
Car demain, il faudra répondre à des objectifs nouveaux (apparition d’une nouvelle maladie, nouvel impact réglementaire, nouveau débouché…) en le moins de temps possible. L’objectif du programme AKER est de diminuer par deux ce temps de « réactivité ». D’une part, AKER a déjà bénéficié de techniques permettant d’aller plus vite dans la sélection. Ainsi, la technique « graine à graine », prônant un cycle court en conditions hors-sol contrôlées sous serre (vernalisation, induction, croisements), a permis de déployer le programme de sélection en 5 ans au lieu de 10 ans. D’autre part, AKER offrira lui-même les moyens de raccourcir les schémas de sélection, notamment avec la sélection génomique qui devrait permettre de réduire le cycle de sélection d’une année sur 5, soit 20 %, pour obtenir une nouvelle variété.
AKER est un programme précurseur. On pourra se demander à l’issue du programme ce qu’il en aurait été s’il n’avait pas eu lieu, et on peut raisonnablement se dire dès maintenant qu’il y a un avant et un après AKER. Certes, la betterave est une culture vertueuse grâce au travail de longue haleine fourni par la recherche, à la remarquable adaptabilité de la plante, à la technicité des agriculteurs et à la qualité des organisations professionnelles de la filière. Néanmoins, le programme AKER permet de créer une rupture par rapport au passé aux plans du génotypage (analyse des génomes), du phénotypage (évaluation des caractères) et du traitement des données (bio-informatique). De sorte que la betterave va pouvoir reprendre de l’avance et se retrouver dans le peloton de tête des plantes cultivées aux côtés du maïs.